Ce texte que je porte à votre connaissance, est plus que jamais d’actualité quand on constate la moralité désuète où se trouve notre nation.
Nos politiques font ils preuve de patriotisme quand, seulement ils pensent à tirer profit, alors que les concitoyens vivent dans la précarité.
Pourrions penser un seul instant qu’ils se battraient pour protéger notre patrie ?
Cet historien français s’était élevé contre les prétentions de la PRUSSE, dans une lettre publique adressée à son collègue MOMMSEN.
Vous croyez avoir prouvé que l’Alsace est de nationalité allemande parce que sa population est de race germanique et que son langage est l’allemand. Mais je m’étonne qu’un historien comme vous affecte d’ignorer que ce n’est ni la race ni la langue qui fait la nationalité. Ce n’est pas la race : jetez en effet les yeux sur l’Europe et vous verrez bien que les peuples ne sont presque jamais constitués d’après leur origine primitive. Les convenances géographiques, les intérêts politiques ou commerciaux sont ceux qui a groupé les populations et fondé les Etats. Chaque nation s’est ainsi peu à peu formée, chaque patrie s’est dessinée sans qu’on se soit préoccupé de ces raisons ethnographiques que vous voudriez mettre à la mode. Si les nations correspondaient aux races, la Belgique serait à la France, le Portugal à l’Espagne, la Hollande à la Prusse ; en revanche, l’Ecosse se détacherait de l’Angleterre, à laquelle elle est si étroitement liée depuis un siècle et demi, la Russie et l’Autriche se diviseraient chacune en trois ou quatre tronçons, la Suisse se partagerait en deux, et assurément Posen se séparerait de Berlin. Votre théorie des races est contraire à tout l’état actuel de l’Europe. Si elle venait à prévaloir, le monde entier serait à refaire.
La langue n’est pas non plus le signe caractéristique de la nationalité. On parle cinq langues en France, pourtant personne ne s’avise de douter de notre unité nationale. On parle trois langues en Suisse en est-elle moins une seule nation, et diriez-vous qu’elle manque de patriotisme ? D’autre part, on parle anglais aux Etats-Unis ; voyez-vous que les Etats-Unis songent à rétablir le lien national qui les unissait autrefois à l’Angleterre ? Vous vous targuez que l’on parle allemand à Strasbourg ; en est-il moins vrai que l’on a chanté pour la première fois notre Marseillaise ?
Ce qui distingue les nations ce n’est ni la race, ni la langue. Les hommes sentent dans leur cœur qu’ils sont un même peuple lorsqu’ils ont une communauté d’idées, d’intérêts, d’affections, de souvenirs et d’espérances. Voilà ce qui fait la patrie. Voilà pourquoi les hommes veulent marcher ensemble, ensemble travailler, ensemble combattre, vive et mourir les uns pour les autres. La patrie c’est ce qu’on aime. Il se peut que l’Alsace soit allemande par la race et par le langage ; mais, par la nationalité et le sentiment de la patrie, elle est française. Et savez-vous ce qui la rendue française ? Ce n’est pas louis XIV, c’est notre Révolution de 1789. Depuis ce moment, l’Alsace a suivi toutes nos destinées ; elle a vécu notre vie. Tout ce que nous pensions, elle le pensait ; tout ce que nous sentions, elle le sentait. Elle a partagé nos victoires et nos revers, notre gloire et nos fautes, toutes, toutes nos joies et toutes nos douleurs. Elle n’a rien eu de commun avec vous. La patrie pour elle c’est la France. L’étranger pour elle c’est l’Allemagne.
Fustel de Coulanges (Réponse à M. Mommsen, professeur à Berlin, 27 octobre 1870)
Chacun d’entre vous pourra apprécier la valeur des patriotes de l’époque. Tout ce que l’on veut nous démontrer aujourd’hui n’est qu’utopie. La création de l’Europe d’aujourd’hui ne correspond à aucune des valeurs du passé. On a cru qu’ils suffisaient à quelques-uns de décider de l’avenir de chacune des patries pour que tout se déroule comme si l’EU serait une seule et grande patrie.
Les guerres meurtrières dont l’Allemagne fut un dénominateur commun, ne pouvait pas et ne pourra pas devenir une alliée de confiance. Trop d’éléments différents entravent ce cheminement.
La patrie pour moi, c’est cette terre qui me donne la force du combat, l’énergie de pouvoir résister aux souffrances morales ou physiques, de partager avec mes semblables le mal et le bien, pour que notre société ne continue à se déshumaniser.
La préparation désordonnée de ces élections présidentielles m’attriste parce qu’elle est le reflet d’une guerre perpétuelle pour l’accès au pouvoir. La patrie n’apparait jamais sereine, les citoyens sont ignorés, l’impuissance gagne les esprits les plus sereins, l’être humain se recroqueville et attend résigné le chaos total.
Bayard